![]() IMPLANTATION ILLEGALE - UN CAS EDIFIANT Le pays est actuellement parsemé d'une multitudes d'antennes émettrices à usage tant public que privé. Ces constructions sont souvent peu conformes aux règles de l'urbanisme et de l'aménagement du territoire. Et si certains viennent à s'étonner que l'on tolère la présence de ces infrastructures dans des zones d'habitat denses, ils doivent savoir que, très souvent, elles sont établies sans enquêtes auprès des riverains, sans l'accord des autorités locales et grâce à la complicité de fonctionnaires de la région wallonne plus intéressés par leur carrière que par la protection du citoyen. Dans l'exemple dont il est question les astuces administratives et juridiques utilisées reflètent une "culture politique" largement répandue au milieu des années 1980. Avec l'apparition d'un troisième opérateur GSM et l'extension du réseau Mobistar, il est toujours à craindre l'utilisation de tels procédés.
Le 4 juillet 1985, rue des Cloutiers,85 à 4621 Retinne (Fleron) les Entreprises Jean Joly à Trooz procède à l'érection d'un pylône de radio-diffusion pour le compte de M. Lucien Quoidbach animateur de ce qui est alors Radio Bois de Breux. Il importe de savoir que cet "ouvrage" à été réalisé sans la moindre autorisation ni démarche de qui que ce soit et sans qu'un plan ait été dressé et est situé à moins de 20 mètres des habitations les plus proches. Malgré les protestations des riverains et une descente de police au cours de laquelle un procès verbal est dressé, la construction de 48 mètres de haut est menée à son terme. Le collège échevinal de FLERON se réuni au retour des vacances, et condamne majorité PS contre opposition un procédé aussi cavalier. Aucune poursuite pénale n'est envisagée. Quelques temps plus tard, le fonctionnaire délégué de l'administration provinciale émet l'avis suivant "ce type d'antenne porte atteinte à l'environnement et devrait se situer à une distance des propriétés voisines égales à sa hauteur".
Devant les difficultés rencontrées, M.Quoidbach prend conseil en la personne de Me Michel Firket (actuel échevin de l'urbanisme et de l'environnement de la Ville de Liège)(sic). Ils introduisent le 4 décembre 1985 une demande de permis de bâtir, avec plan, qui est transmise au même fonctionnaire provincial. Et à la stupéfaction générale celui-ci remet un avis favorable. En guise d'explication, il fait parvenir, en annexe, une lettre émanant de M.Melchior Wathelet Ministre Président de la Région Wallonne lui "demandant" de revoir sa position première. Elle est libellée en ces termes et témoigne bien du mépris total du ministre pour la sécurité des citoyens: "Tant qu'il n'y a pas atteinte à l'environnement (sic) et à condition que le maître d'ouvrage dispose d'une bonne assurance en responsabilité civile, il n'y a pas lieu de s'opposer à l'octroie du permis de bâtir " Le 4 février 1986 le permis est refusé par le Collège échevinal de Fléron. Contre le deuxième avis du fonctionnaire délégué, le 26 juin 1986, la Députation permanente de la Province de Liège confirme la décision du Collège échevinal du 4 février. Entre temps Radio Bois de Breux a commencé à émettre. Fort de l'appui qu'il y trouve, M. Quoidbach introduit, le 22 juillet, auprès de l'Exécutif de la Région Wallonne un recours contre la décision du 26 juin. Le 3 octobre les différentes parties sont convoquées par la Région Wallonne, dont les experts confirment la décision de la Députation Permanente de refuser le permis de bâtir: " .Considérant que la construction de ce pylône d'antenne est incompatible de par sa hauteur et son implantation avec le voisinage immédiat où est situé un quartier très populeux de la localité de Retinne. Considérant que l'implantation de ce pylône ne répond pas aux normes prescrites par la circulaire du 14 mars 1985 2 V 611.01 qui stipule notamment que ce genre d'installation doit être édifié à une distance au moins égale à sa hauteur des propriétés voisines Considérant que les travaux exécutés constituent un mauvais aménagement des lieux; que le fait que la construction soit en cours d'exploitation ne représente en aucun cas une justification pertinente, mais bien au contraire est constitutif d'une infraction . Le recours introduit par M. Lucien Quoidbach est rejeté." Il est à remarquer qu'à l'époque il n'est pas encore question des nuisances pouvant résulter de l'exposition prolongée aux ondes électromagnétiques. Cet arrêté est soumis à la signature de M.Albert Lienard ministre "responsable" de l'aménagement du territoire. L'affaire semble entendue.
Le 10 octobre M.Quoibach envoie par recommandé un rappel au Ministère de la Région Wallonne. Mais M. Lienard en s'abstenant de signer dans les trente jours suivant ce rappel, rejette implicitement les conclusions de ses experts. Le 16 décembre 1986 M.Quoidabch reçoit de la Région Wallonne la lettre suivante: "J'ai l'honneur de vous informer qu'aucune décision n'a été prise dans le délai de trente jours prévu à l'article 51 §2 dernier alinéa du Code Wallon de l'Aménagement du Territoire et de l'Urbanisme. En conséquence, vous êtes en droit de passer à l'exécution des travaux ." Cela semble être une pratique assez courante puisqu'il ne s'agit même pas d'une lettre personnalisée mais d'un simple formulaire standard polycopié.
Secondés par Me Marcy, les riverains et l'Administration Communale de Fleron intentent, devant le Conseil d'Etat, un recours en annulation de l'abstention valant décision du Ministre de la Région Wallonne.
Entre temps Radio Bois de Breux devient membre du réseau Radio Contact. . A la tête duquel on retrouvent plusieurs personnalités politiques libérales de haut niveau.
On assiste alors à un feu nourri de requêtes en intervention émanant de Me Firket et de deux avocats au barreau de Bruxelles, Eric Gillet et Pierre Lambert. Il est vrai qu'être affilié à Radio Contact donne des moyens. Les avocats plaident tant sur le fond que sur la forme et il est fait abondamment référence à la jurisprudence. Me Firket va jusqu'à brandir le spectre de la faillite de ce qu'il affirme toujours être la petite société de 5 personnes "Radio bois de Breux."
Entre temps Melchior Wathelet devient Ministre de la Justice et la majorité est renversée au Collège Echevinal de Fleron. En janvier 1989, le Conseil d'Etat se contente de statuer sur la forme sans aucune considération sur le fond du problème et rejette le recours en annulation des riverains: .Considérant, d'office, que le Code wallon dispose en son article 52, §2, cinquième alinéa, que "Si, à l'expiration d'un nouveau délai de trente jours, prenant cours à la date du dépôt à la poste, de l'envoi recommandé contenant rappel, le demandeur n'a pas reçu de décision, il peut, sans autre formalité, passer à l'exécution des travaux ou accomplir les actes en se conformant à des indications et prescriptions qu'il détermine;" que l'absence de décision pouvant n'être pas volontaire et n'étant pas réputée telle par la loi, l'autorisation de bâtir attaquée n'est pas un acte administratif pris par une autorité habilitée par la loi à l'accomplir mais est un simple effet de la loi ou, ce qui revient au même, d'une situation à laquelle la loi le subordonne; que le recours n'est pas recevable . Me Marcy de commenter: "Vous constaterez que le Conseil d'Etat considère que la requête déposée doit être rejetée aux motifs purement juridiques que l'absence de décision du Ministre ne peut pas être considérée comme une abstention volontaire mais que, bien au contraire, l'autorisation de bâtir qui en découle ne constitue pas un acte administratif mais un effet de la loi."
L'affaire est entendue. Il n'y a plus pour les riverains aucun recours possible. Un an plus tard l'émetteur sera saisi par la RTT, en cause une puissance d'émission supérieure à celle autorisée. Le pylône reste à l'abandon jusqu'en novembre 1994, après que l'actuelle majorité communale eut octroyer de façon formelle toutes les autorisations de bâtir et d'exploiter. Radio Nostalgie ( liée au groupe Contact ) commence ses émissions à cette période. En aout 1996 l'opérateur GSM Mobistar profite de l'opportunité pour installer sur ce même pylône un de ses relais, enlaidissant encore un peu plus les lieux. Ce qui ne semble guère perturber l'échevin de l'environnement de la commune de Fleron. A ce jour aucune enquête d'incidence n'a été effectuée pour vérifier s'il n'y a pas de risque pour l'environnement et pour la santé des populations alentours.
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